mercredi 26 octobre 2011

LES AFRO-AMERICAINS au cinéma

Dans La couleur des sentiments (en salles depuis mercredi), Tate Taylor revient sur la ségrégation des années 60 et le mouvement pour les droits civiques. Retour sur ces films qui traitent de la discrimination des afro-américains aux Etats-Unis.

Le plus lacrymal 
LA COULEUR DES SENTIMENTS de Tate Taylor (2011) 
Alors que les tensions montent entre bourgeoises rousses (Jessica Chastain et Bryce Dallas Howard) et nourrices noires (Viola Davis et Octavia Spencer), Skeeter (Emma Stone confirme son ascension à Hollywood) décide de leur donner la parole pour faire évoluer les mentalités. Adaptation du best-seller de Kathryn Stockett (qui fait une apparition dans le film), La couleur des sentiments est resté tout un mois en tête du box office américain. La réalisatrice Tate Taylor, amie d’enfance de l’auteur, a recréé avec exactitude le Mississippi des années 60 et a principalement tourné dans la ville de son enfance. 
Résultat : une œuvre fidèle au roman original qui fait la part belle à ses actrices, toutes étoiles montantes du cinéma.

Le plus musical 
HAIRSPRAY d’Adam Shankman (2007) 
Tracy n’a qu’un rêve : intégrer le Corny Collins Show. Par chance, elle est repérée. Mais son implication dans le mouvement des droits civiques lui vaut d’être poursuivie par la police. Ce remake tout aussi déjanté que son modèle (Hairpsray de John Waters, 1988) sonne le grand retour de John Travolta au genre qui a fait son succès. Travesti en femme pour l’occasion, l’acteur reprend sans mal le personnage initialement interprété par Divine. Nikki Blonsky, qui a patienté 5 ans pour incarner Tracy, succède avec un enthousiasme non dissimulé à Ricki Lake
Résultat : un hymne fantaisiste à la tolérance sur fond de musique sixties : deux heures de bonheur.

Le plus romancé 
HURRICANE CARTER de Norman Jewison (1999) 
1966, le boxeur Rubin « Hurricane » Carter est accusé de triple meurtre. Condamné à perpétuité, il clame son innocence en vain jusqu’au jour où un jeune ado décide de tout mettre en œuvre pour lui rendre sa liberté. Au son de Hurricane, la célèbre chanson de Bob Dylan (composée après avoir rencontré le boxeur), Denzel Washington livre une incroyable performance qui lui vaudra le Golden Globe du meilleur acteur dramatique et l’Ours d’argent de la meilleur interprétation masculine au Festival de Berlin. 
Résultat : Norman Jewison, déjà à l’origine d’œuvres engagées (Dans la chaleur de la nuit, 1967, voir infra) a été critiqué pour avoir dénaturé les faits et enjolivé la personnalité du boxeur mais Hurricane Carter n’en reste pas moins un très beau film sur l’espoir et la persévérance. 

Le plus historique 
AMISTAD de Steven Spielberg (1998) 
Grand enfant dans l’âme, Steven Spielberg ne s’est pas pour autant limité au film de divertissement. Après La couleur pourpre mal accueilli par le public, le réalisateur tente de se dédouaner en délivrant un véritable plaidoyer pour les droits de l’homme. Il remonte jusqu’à l’esclavage et s’inspire d’une histoire vraie. En 1839, au bord de La Amistad, des esclaves africains se soulèvent et prennent les armes au large de Cuba. Alors qu’ils obligent leurs bourreaux à reprendre la route de l’Afrique, ceux-ci profitent de leur ignorance et se dirigent vers l’Amérique. Une fois au Nouveau monde, les mutins sont jugés pour rébellion. 
Résultat : un drame historique illuminé par la présence de Djimon Hounsou, alors encore débutant (il ne parle que cinq mots d’anglais dans le film).

Le plus personnel 
MALCOLM X de Spike Lee (1992) 
Figure de proue du mouvement des droits civiques, Malcolm X était aussi un homme controversé (certains l’accusaient de prôner la suprématie noire). Impossible de faire l’impasse sur le leader de Nation of Islam pour Spike Lee qui n’hésite pas à se pencher sur ses zones d’ombres. Il est si enthousiaste qu’en manque de budget, il fait appel à ses amis Oprah Winfrey, Michael Jordan et Bill Cosby pour achever le tournage. Dans la peau de Malcolm X, un autre proche du réalisateur : Denzel Washington. Sept ans avant Hurricane Carter, l’acteur reçoit son premier Ours d’argent à Berlin et est nommé à l’Oscar du meilleur acteur. 
Résultat : un biopic passionnant porté de bout en bout par un Denzel Washington au sommet.

Le plus marquant 
MISSISSIPPI BURNING d’Alan Parker (1988) 
Après Angel Heart (1987) où il s’intéresse à la question du vaudou à la Nouvelle-orléans, Alan Parker retourne dans le sud. Cette fois-si, il s’inspire d’un fait réel pour aborder la discrimination ambiante dans le Mississippi des années 60. En 1964, deux agents du FBI (Gene Hackman et Willem Defoe, véritables chevaliers blancs) mènent l’enquête sur la disparition de trois militants des droits civiques. Ils remarquent vite que leur présence dérange. 
Résultat : un polar intense, d’une violence redoutable. Cinéaste engagé, Alan Parker signe un pamphlet nécessaire contre le racisme primaire et son prescripteur, le Klu Klux Klan, véritable plaie à l’époque. A voir absolument.

Le plus polémique 
LA COULEUR POURPRE de Steven Spielberg (1986) 
Douze ans avant Amistad, Spielberg adapte le roman éponyme d’Alice Walker paru en 1984 et récompensé par le prix Pulitzer. La couleur pourpre qui conte l’histoire de deux sœurs et de leur famille dans la première moitié du XXème siècle dans le Sud des Etats-Unis, suscite de vives critiques à sa sortie. Malgré la qualité évidente du film et ses 11 nominations aux Oscars (il n’en remporta d’ailleurs aucun), les gens ne comprennent pas qu’un homme blanc et juif (en l’occurrence Spielberg) veuille porter à l’écran une œuvre consacrée aux populations noires. Au final, la polémique est tombée dans l'oubli, et le film est devenu culte. 
Résultat : un film intime et émouvant qui permettra à Whoopi Goldberg de percer au cinéma.

Le plus précurseur 
DEVINE QUI VIENT DÎNER de Stanley Kramer (1967) 
En plein mouvement des droits civiques, traiter du couple mixte au cinéma relève d’un choix très osé. En 1967, encore 16 Etats américains interdisaient une telle union. Dans Devine qui vient dîner, une jeune fille de bonne famille décide de présenter son fiancé à ses parents, enchantés jusqu’à ce qu’ils découvrent que celui-ci est noir. Avec 10 nominations aux Oscars (dont celui de la meilleure actrice et du meilleur scénario), Devine qui vient dîner devient un film symbole où le déjà célèbre Sidney Poitier entérine son statut de porte-drapeau de la cause noire. Surtout grâce à une scène d’anthologie où l’acteur s’oppose à son père de fiction (Rappel : Poitier est le premier acteur noir oscarisé en 1963 pour Le lys des champs).  
Résultat : malgré sa naïveté, Devine qui vient dîner reste un film audacieux qui marque la dernière collaboration entre Katharine Hepburn et Spencer Tracy (l’acteur est mort 17 jours après le tournage).

Le plus récompensé 
DANS LA CHALEUR DE LA NUIT de Norman Jewison (1967) 
Avant Hurricane Carter, Jewison traitait déjà de la discrimination raciale. A Sparta dans le Mississippi, un policier noir est arrêté pour meurtre. Après la découverte de son identité, il est relâché sans un mot d’excuse. Son supérieur lui ordonne alors de rester en ville et de retrouver l’assassin. Basé sur le roman de John Ball publié en 1965, Dans la chaleur de la nuit remportera 5 oscars dont celui du meilleur film. Porté par une bande son de légende composée par Quincy Jones et interprétée par Ray Charles, le film a tant de succès qu’il donnera lieu à deux suites, Appelez moi Monsieur Tibbs en 1970 et L’Organisation en 1971 où Sidney Poitier reprend le rôle de l’imperturbable détective Virgil Tibbs.
Résultat : le film a mal vieilli mais témoigne de son époque.

Le plus culte 
AUTANT EN EMPORTE LE VENT de Victor Fleming (1939) 
L’adaptation du best-seller de Margaret Mitchell (récompensée par le prix Pulitzer) nous emporte au cœur du Sud ségrégationniste en pleine guerre de Sécession. Scarlett O’Hara, membre de la haute société sudiste n’a d’yeux que pour le beau Ashley fiancé à sa cousine Mélanie tandis que le forceur de blocus, Rhett Butler tombe sous son charme. Si le film n’aborde la question de l’esclavage que de manière secondaire, ses retombées médiatiques la placeront sur le devant de la scène. A cause des lois raciales en vigueur en Géorgie, Hattie McDaniel (Mamma) n'avait pu assister à la première du film à Atlanta. Hollywood la vengera en faisant d’elle la première femme noire nommée et récompensée d’un Oscar (le film en remportera 7 autres). Une petite révolution avant 20 ans le début du mouvement des droits civiques. 
Résultat : En rapportant les bénéfices au niveau actuel du dollar, Autant en emporte le vent serait le plus gros succès de tous les temps et atteindrait 1.250.000.000 $ de recettes.

2 commentaires:

Wilyrah a dit…

Hairspray ce sera sans moi. Quant à The Help, un joli film, un peu consensuel et manichéen mais un bon casting et de belles scènes.

Les meilleurs films a dit…

Un très bon article sur un cinéma très intéressant. Une bonne liste à voir ou à re-voir !