Sortie : 4 février 2009
De : Zack Snyder
Avec : Jackie Earler Haley, Patrick Wilson, Jeffrey Dean Morgan, Matthew Goode, Billy Crudup, Malin Akerman, Carla Gugino...
1985, Nixon en est à son cinquième mandat tandis que la menace d'une guerre nucléaire mondiale est imminente. Terrés depuis la loi Keene de 1977 leur interdisant d'exercer, les super-héros devenus des parias après avoir été acclamés par les foules, reprennent du service pour sauver la planète et déjouer un complot visant à les éliminer.
Alan Moore, auteur de V for vendetta déjà adapté au cinéma, est surtout connu des amateurs de comics pour son roman graphique Watchmen. Edité de 1986 à 1987, cette oeuvre de douze tomes a été classé parmi les 100 meilleurs romans de langue anglaise depuis 1923 par le "Time magazine". Réputé intransposable au cinéma, et de maintes fois abandonné (notamment par Terry Gilliam ou Darren Aronosky), le projet est finalement porté à l'écran par Zack Snyder, habitué aux adaptations de bandes dessinées depuis 300.
Attendu car annoncé depuis un certain temps, le film déçoit. Pourtant, l'énergique scène d'ouverture bercée par le magnifique "Unforgettable" de Nat King Cole ainsi que le magnifique générique qui suit, laissait présager un très bon film. Mais dès que l'intrigue se retrouve mêlée au traitement successif de chaque personnage, le film perd de sa vitalité. Il n'en est pas arrivé au point de perdre le spectateur mais les défauts sont trop gros pour passer inaperçus. Premièrement, le scénario adapté n'est pas à la hauteur de l'oeuvre originale. Jamais le film ne parvient à rendre compte de l'immensité du travail de Moore. Loin d'égaler la subtilité d'un Dark Knight, Watchmen, sans être totalement mauvais, ne fait qu'accumuler une multitude de faits passés et présents qui tentent de nous faire comprendre la situation actuelle. Il est vrai que si The Dark Knight ne se concentrait que sur trois personnages (Batman, Harvey Dent, et le Joker), ici, le scénariste doit prendre en considération six super-héros. Autant dire que le montage était un sacré challenge. Challenge qui n'a pas été relevé ici.
Le montage, désastreux, tend à ne privilégier aucun personnage plus qu'un autre. Malheureusement, certains d'entre eux emportent immédiatement notre adhésion quand d'autres nous assomment profondément. Le Dr Manhattan, seul super-héro à posséder des pouvoirs surnaturels suite à un accident chimique, parle d'un ton monocorde tout au long du film sur des thèmes philosophiques à mourir d'ennui. Le Hibou, et le Spectre Soyeux (seule femme de la bande) sont à l'évidence trop mis en avant, une concentration moins assidue sur leurs personnages complètement dispensables, aurait pu faire économiser de nombreuses minutes au film. En effet, les studios dans une optique purement économique ont refusé une trop longue durée. Mais vu la densité du comic, faire moins de deux heures quarante (la durée du film) semblaient difficile or certaines scènes réellement inutiles auraient pu être évincées. Ainsi la suppression de tous ces lassants ralentis à chaque scène ou celle du pseudo-triangle amoureux (Manhattan-Spectre Soyeux-Hibou) auraient rendu le film bien plus dynamique. Heureusement, qu'il nous reste le Comédien et sa morale bien personnelle, Ozymandias et sa quête absolue, et Rorschach et son implacable sens de la justice pour nous faire passer de bons moments. Irrévérencieux et toujours droits dans leurs prises de positions, mêmes les plus extrémistes, ils sont intelligemment traités face au vide scénaristique laissé par les trois autres héros précités. Le scénario définitivement inégal avait pourtant tous les éléments pour nous passionner, le comic regorgeant de questions philosophiques et politiques. Telles que l'humanité mérite-t-elle d'être sauvée? Et si oui, des moyens peu scrupuleux peuvent-ils le justifier?
Malheureusement le ton monocorde du Dr Manhattan, le plus philosophe et le plus bavard de la troupe, ainsi que les effets spéciaux assez grossiers, le rendent totalement inexpressif et donc immédiatement soporifique. Du coup, les thèmes métaphysiques passent sous le nez du spectateur.
Là, où on attendait un film capable de rivaliser avec The Dark Knight (désormais, la référence en matière de super-héros), Watchmen n'est qu'un action movie de plus. Et sans être un expert dans le domaine des comics, on peut sans risque affirmer que Snyder (sans doute par absence de carte blanche de la part de la production) n'a pas rendu l'hommage mérité au travail d'Alan Moore.