De : Lars Von Trier
Avec : Kirsten Dunst, Charlotte Gainsbourg, Kiefer Sutherland, Alenxander Skarsgård ; Stellan Skarsgård, John Hurt, Charlotte Rampling, Brady Corbet…
« La mélancolie, c'est le bonheur d'être triste » (Victor Hugo, extrait des « Travailleurs de la mer »)
Déclaré persona non grata par les dirigeants du festival de Cannes en mai dernier*, Lars Von Trier va beaucoup manquer. Aux cinéphiles, mais aussi et surtout à ses actrices en quête d’un des plus prestigieux prix cinématographiques. Après Björk en 2000 pour Dancer in the Dark, et Charlotte Gainsbourg en 2009 pour Antichrist, c’est au tour de Kirsten Dunst de remporter le prix d’interprétation féminine grâce à un film du réalisateur danois. La rumeur veut même que sans cet exil forcé, Melancholia aurait certainement remporté la Palme d’or. Une Palme qui aurait été grandement mérité (elle a finalement été remise au magnifique Tree of life).
Tous les acteurs sont incroyablement bons. Mais Robert De Niro et le reste du jury ne s’y sont pas trompés en récompensant Kirsten Dunst. Dans la première partie qui lui est consacré, l’actrice, solaire même au plus profond de la dépression, traîne sa mélancolie comme elle porte sa robe de mariée. Avec une grâce insolente. Justine, parée de son plus joli sourire de façade à l’occasion de son mariage mort né, sombre dans une mélancolie incontrôlable et gâche la fête (une fête aussi très drôle grâce à un Kiefer Sutherland sur les nerfs et à une Charlotte Rampling rabat-joie). S’enfonçant dans une profonde dépression inexpliquée, elle part s’installer dans la somptueuse demeure de son aînée sur qui est accès le second fragment du film. Sœur très maternelle, Claire, est aussi terre à terre que Justine est irrationnelle. Contradictoires, les deux femmes se complètent et font sablier. Quand il devient certain que la planète Melancholia fera plus que frôler la Terre, Justine reprend de l’entrain (paradoxalement la mort lui redonne le goût à la vie) tandis que Claire sombre, les rôles s’inversent, cette fois-ci, c’est la mélancolique qui guide la cartésienne.
Kirsten Dunst comme Charlotte Gainsbourg sont parfaites. L’actrice américaine, déjà toute languissante dans Virgin Suicides et Marie-Antoinette, élève la détresse de l’âme au rang d’art. Et seule le fait que Charlotte Gainsbourg fut récompensée, deux ans plutôt pour Antichrist, peut expliquer son absence aux côtés de sa partenaire sur la scène du Palais des Festivals.
Les dix premières minutes du film, où Lars Von Trier se rêve en Terrence Malick avec de jolis tableaux graphiques sur fond de Wagner, laissent indifférent, tout comme l’ultime plan large. Mais pour le reste, le réalisateur danois est proche de la perfection. Il a pourtant récemment fait comprendre que son dernier film était loin d’être son préféré. Dommage car Melancholia est à coup sûr son œuvre la plus accessible, la plus réussie, la plus belle, la plus émouvante.
*Lors de la conférence de presse donnée à l’issue de la projection officielle du film, le réalisateur danois s’est enlisé dans des plaisanteries relatives au nazisme et à la question juive. Lars Von Trier présente des excuses publiques mais devant le tollé général, les dirigeants du Festival décident de bannir définitivement le cinéaste. Ils laissent toutefois « Melancholia » en compétition, décidant de différencier les propos de l’artiste et son œuvre.
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